Titre : Un poisson nommé Anatole
Auteur : Sayana
Genre : histoire vécue ^^
Note de l’auteur : j’ai retrouvé par hasard cette
vieille histoire que j’avais écrite au lycée et j’ai
bien rigolé en la relisant. Du coup, j’ai eu envie d’en faire
profiter tout le monde en l’améliorant un peu.
Disclamer : comme je l’ai dit plus haut, c’est une histoire
vraie (on ne rigole pas !) donc tous les personnages cités existent vraiment,
j’ai juste changé les noms (sauf Anatole qui est le vrai prénom
de mon prof ^^). Si quelqu’un se reconnaît, envoyez-moi un petit
message (les autres aussi d’ailleurs), ça me fera plaisir !
Bonne lecture !
Un poisson nommé Anatole
Vendredi 1er avril. Une date particulière. Un de ces jours où
tout peut arriver. Même quand on ne s’y attend pas. Surtout quand
on ne s’y attend pas.
Qui aurait imaginé cela de la part d’un prof ? Un prof de maths
par-dessus le marché, tout ce qu’il y a de plus sérieux
et austère en somme, quelqu’un pour qui la plaisanterie se résume
à un problème où un train arrive avant d’être
parti.
Et pourtant ! Il cachait bien son jeu, Anatole.
Anatole ? C’était ce stagiaire qui avait eu l’idée
saugrenue de vouloir devenir prof de maths. Comme pour le punir de cette prétention,
il nous avait, nous, la Seconde 6, comme première et unique classe en
cette année d’apprentissage. Il aurait pu tomber plus mal, bien
sûr, mais nous n’étions déjà pas un cadeau
: une trentaine d’adolescents de 16 ans, ce n’est jamais facile,
surtout pour un jeune prof de 26 ans. Pourtant, nous l’aimions bien, Anatole,
avec son air timide et complexé. Il nous arrivait parfois de le taquiner,
mais comme dit le proverbe : qui aime bien châtie bien ... Ce n’était
jamais méchant, il le prenait plutôt bien, il en riait même.
Peut-être était-ce pour mieux préparer sa vengeance ...
¤ ¤ ¤
Pillie était toute souriante à notre entrée dans la classe.
Pillie, c’était le surnom que nous donnions à notre prof
d’espagnol, une jolie jeune femme très sympathique qui en faisait
craquer plus d’un.
Elle attendit que nous soyons tous assis pour réclamer notre attention.
- J’ai
un petit service à vous demander, déclara t’elle avec un
grand sourire.
Avant même
de savoir ce que c’était, les garçons opinèrent immédiatement.
Pillie pouvait requérir ce qu’elle voulait, elle était sûre
de toujours l’obtenir, ce qui est plutôt rare pour un prof.
- Tout à
l’heure, pendant votre cours de maths, une inspectrice viendra observer
M. Nathan. Ce serait très gentil de votre part d’être calmes
et attentifs pendant la leçon, pour faire bonne impression à l’inspectrice.
Comme je vous
l’ai déjà dit, Anatole était stagiaire, ce qui lui
valait d’être régulièrement contrôlé.
Un inspecteur s’asseyait au fond de la classe et considérait ses
méthodes de travail, sa faculté à obtenir l’attention
... Bref, tout ce qu’est censé faire un bon prof. Dans ces cas
là, nous faisions un petit effort pour être agréables, histoire
de ne pas lui attirer de remontrances. Et comme cette fois ci, la requête
venait de la jolie Pillie ... la partie était gagnée d’avance.
¤ ¤ ¤
Nous sommes arrivés à l’heure devant la classe et, oh surprise
! Anatole était méconnaissable. Costume, cravate, il s’était
fait tout beau (enfin, façon de parler !) pour recevoir l’inspectrice,
qui devait vraiment être une personne importante pour son avenir.
Vaguement impressionnés, nous avons gagné nos places. L’inspectrice
était bien là, installée au fond de la salle : chignon,
tailleur strict, lunettes cerclées, elle avait un air sérieux
et sévère, revêche même. Pauvre Anatole, il devait
être dans tous ses états, lui qui était toujours si intimidé
; la présence de cette femme ne devait pas arranger les choses.
Sans nous concerter, nous nous sommes assis sans bruit, bien décidés
à être exemplaires. Si vous nous aviez vus ! Jamais nous n’avions
été aussi sages. Des élèves modèles. Le rêve
de tout professeur.
Nous avons posé des questions sur la leçon (et même des
questions pertinentes et intelligentes), tout le monde se portait volontaire
pour les exercices au tableau, personne ne bavardait ...
Anatole, même s’il était stupéfait d’un tel
comportement, n’en laissait rien paraître, et le cours s’acheva
dans cette atmosphère studieuse.
Lorsque la sonnerie retentit, personne, contrairement à notre habitude,
ne se leva. Nous attendions le « signal » d’Anatole.
Mais il restait là, debout, immobile, à nous regarder un par un,
un sourire énigmatique au coin des lèvres. Il devait pourtant
deviner notre impatience de partir. C’était l’heure d’aller
manger et notre faim s’était accrue avec l’attention inhabituelle
que nous avions porté à la leçon. C’était
une activité épuisante quand on y était peu habitués.
Anatole finit par prendre une craie sur son bureau et se dirigea vers le tableau.
Il était capable de nous faire une mauvaise blague, par exemple nous
donner une page entière d’exercices en devoirs, pour montrer à
l’inspectrice qu’il nous faisait bien travailler le week-end.
Il nous regarda une dernière fois en souriant puis il dessina sur le
tableau ... un beau poisson. Quelques murmures d’incompréhension
s’élevèrent dans la classe.
Anatole se tourna vers nous, le visage solennel.
- Je vous remercie
de l’attention que vous avez portée à mon cours. J’espère
que vous l’avez apprécié. J’espère également
qu’il a plu à ma mère, ici présente.
Devant notre
air ahuri et incrédule, il éclata de rire, aussitôt imité
par la soi-disant inspectrice.
Cette femme, c’était en fait sa mère !
Et il l’avait fait passer pour une inspectrice pour nous piéger
!
Et ça les faisait rire !
Ca se comprenait, en fait. Pas un instant nous ne nous étions doutés
de la supercherie. On avait l’air malin !
Mais après tout, qui a dit que seuls les professeurs devaient être
les victimes des blagues de leurs élèves ?
En tout cas, il nous avait bien eus, ce sacré Anatole ! Quel poisson
d’avril !
FIN